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Forum de la section presse information de l'IHECS (Institut des Hautes Etudes des Communications Sociales)

23 février 2007

Etat des lieux inquiétant
sur la
liberté de la presse

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(Ben Heine © Cartoons)

Reporters Sans Frontières a rendu public, début février, son rapport annuel 2007 qui dresse un état des lieux de la situation de la liberté de la presse dans 98 pays. Ce document revient sur les principales violations des droits des journalistes survenues en 2006 et offre des perspectives thématiques et régionales sur l’état des libertés des médias et de l’Internet à travers le monde.

"Ce rapport recense les pires violations de la liberté de la presse commises dans les Etats répressifs, de la Corée du Nord à l’Erythrée, en passant par Cuba et le Turkménistan. Mais il s’intéresse également aux démocraties dans lesquelles des progrès restent à accomplir et des acquis sont menacés", a écrit Reporters sans frontières.

"Nous sommes, d’ores et déjà inquiets pour l’évolution de la situation en 2007, a ajouté l’organisation. Six journalistes et quatre collaborateurs des médias ont été tués au mois de janvier".

"Mais, au-delà de ces chiffres concernant notamment les journalistes tués ou emprisonnés, Reporters sans frontières veut tirer la sonnette d’alarme au terme d’une année 2006 marquée par le peu d’ambition, et parfois même le renoncement, des pays démocratiques à défendre les valeurs qu’ils sont censés incarner. Si tout le monde ou presque se réclame des droits de l’homme, on peut se demander, au vu des silences et des pratiques des uns et des autres, qui, aujourd’hui, a l’autorité morale requise pour incarner une défense sans complaisance de ces libertés", indique Reporters sans frontières en préambule de son rapport.

L’affaire des caricatures de Mahomet publiées au Danemark a cristallisé l’attention du monde entier sur les questions de la liberté d’expression et du respect des croyances religieuses. Là encore, les Etats démocratiques n’ont même pas assuré le service minimum à l’égard du Danemark - dont les représentations diplomatiques étaient visées - et des journalistes menacés ou arrêtés. Comme si, craignant de se brouiller avec les régimes arabes et musulmans, l’Europe notamment avait abdiqué toute volonté de se faire entendre.

Au Moyen-Orient, les journalistes ont encore payé le prix de l’instabilité chronique de la région. Au moins 65 professionnels de l’information ont été tués en Irak et les enlèvements se sont multipliés dans le pays, ainsi que dans les Territoires palestiniens. Et, malgré les promesses répétées de leurs dirigeants, les Etats du monde arabe n’ont pas connu d’avancée démocratique significative.

En Amérique latine, l’assassinat de près d’une dizaine de journalistes au Mexique dans une quasi-impunité, le maintien en détention de plus d’une vingtaine de journalistes à Cuba, la dégradation de la situation en Bolivie, le pays du Sud pourtant le mieux placé jusqu’ici dans le classement établi chaque année par Reporters sans frontières, sont autant d’inquiétudes qui doivent inciter la communauté internationale à la plus grande vigilance.

Les violations de la liberté de la presse en Asie atteignent des seuils alarmants : 16 professionnels des médias ont été tués, au moins 328 interpellés, 517 agressés ou menacés et pas moins de 478 médias ont été censurés en 2006. La censure y reste un phénomène très largement répandu. Peu nombreux sont les pays d’Asie où tout peut être dit ou écrit.

Mépriser les journalistes a été la constante de nombreux Etats africains. Les gouvernements de la Corne de l’Afrique ont été les plus autoritaires envers la presse en 2006. Par ailleurs, l’impunité demeure sur le continent et les assassins de journalistes en Gambie et au Burkina Faso, notamment, bénéficient toujours de la protection de gouvernements complices ou de responsables politiques tout-puissants.

Enfin, les dictatures du Web semblent être passées à la vitesse supérieure. Au moins 60 personnes sont emprisonnées pour avoir publié sur le Net des textes critiques envers les autorités. La Chine, pionnière en la matière, fait des émules : Viêt-nam, Syrie, Tunisie, Libye, Iran... les prisons pour blogueurs et autres cyberdissidents se multiplient.

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--> Source : RSF
--> Rapport 2006
--> Rapport 2005
--> Rapport 2004

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20 février 2007

France/Liban: le récit d’une Bérézina diplomatique

(Ben Heine © Cartoons)

Par René Naba (*)

La France, qui a accueilli le 25 janvier 2007 la conférence des pays donateurs du Liban en vue de résorber le déficit abyssale de la dette publique libanaise générée principalement par la politique spéculative de l‘ancien premier ministre Rafic Hariri (40 milliards de dollars, (soit 180 pour cent du PNB) durant ses dix ans de pouvoir, lui consacre une exposition à l’Institut du Monde arabe (IMA), à partir du 14 février, date commémorative du deuxième anniversaire de son assassinat.

Cette exposition apparaît comme un ultime hommage posthume de la part de son grand ami, le président Jacques Chirac à la veille de la fin de son mandat présidentiel.

Petite piqûre de rappel historique de cette relation singulière dans les annales diplomatiques internationales, une relation marquée par une patrimonialisation des rapports d’État au bénéfice de ces deux hommes arrivés quasi-simultanément au pouvoir à Paris et à Beyrouth.

1) La lévitation

Que les amateurs de conte de fées se détrompent: la jonction de Rafic Hariri avec la France n’est nullement le fruit du hasard. Elle résulte d’une double conjonction: la conjonction des intérêts des états, ceux de la France et de l’Arabie saoudite, les principaux soutiens de l’Irak dans sa guerre contre l’Iran (1979-1988), la conjonction des intérêts des personnes, ceux du Maire de Paris, candidat à la présidence française et de l’homme d’affaires libano saoudien, candidat au poste de premier ministre à Beyrouth. Cette double conjonction donnera à la relation Chirac Hariri une tournure singulière pour atteindre son paroxysme avec la présence simultanée des deux hommes au pouvoir à Paris et à Beyrouth entre 1995 et 1998, conditionnant pour une large part les relations franco-libanaises de la dernière décennie du XX me siècle et sans doute au delà.

Tout commence au début de la décennie 1980, au paroxysme de la guerre froide, de la rivalité soviéto-américaine et de la montée en puissance du fondamentalisme islamique. La révolution khomeyniste triomphait en Iran (février 1979), le sanctuaire de La Mecque, un des hauts lieux saints de l’Islam, était pris d’assaut part les militants islamistes, (Octobre 1979) et le président égyptien Anouar El-Sadate, qui avait pactisé avec Israël, était assassiné deux ans plus tard, en octobre 1981. La France, qui n’avait pas encore réintégré le giron de l’Otan, comptait parmi les acteurs du jeu diplomatique régional, et, l’Arabie Saoudite, fidèle à elle-même, était déjà le principal bailleur de fonds des équipées pro-occidentales. Sur fond de conflit irako iranien naissant, les deux pays scellent leur coopération sur le terrain, dans l’affaire de La Mecque, où les super gendarmes français du GIGN (groupe d’intervention de la gendarmerie nationale) prêtent main forte aux Saoudiens pour «neutraliser» les assaillants anti-monarchiques.

Se délestant du bénéfice de l’hospitalité qu’elle avait accordée au guide de la révolution islamique iranienne, l’Ayatollah Ruhollah Khomeiny à Neauphle-le-château (région parisienne), la France, sous l’impulsion du lobby militaro pétrolier, véritable maître d’oeuvre de la politique pro irakienne depuis la décennie 1970 sous tous les présidents français successifs, devient le principal partenaire militaire occidental de Bagdad, et, l’Arabie Saoudite, son principal soutien financier. «Co-bélligérants» auprès de l’Irak, les deux pays se retrouvent en porte-à-faux avec le noyau dur du monde arabo-musulman, inexorablement en butte à son hostilité en Irak face à l’Iran, au Tchad face à la Libye et surtout au Liban face à la Syrie.

Zone d’influence traditionnelle de la France et de l’Arabie Saoudite, le Liban est de surcroît le point de fixation des conflits régionaux, les deux pays vont là aussi faire cause commune, l’un en sa qualité de protecteur traditionnel des chrétiens, l’autre en sa qualité de parrain des sunnites, pour assurer la promotion d’un «produit de synthèse», un «homme de synthèse», au motif de sauvegarder l’ancienne formule libanaise de coexistence islamo chrétienne et de maintenir le Liban dans le giron occidental, «le port de Beyrouth sous le contrôle de l’Occident», selon l’expression du général Alexander Haig, secrétaire d’état durant le siège de la capitale libanaise en juin 1982.

L’ambassadeur Louis Delamarre, en 1981 à Beyrouth, 58 soldats du contingent français de la Force multinationale occidentale (attentat du PC Drakkar, le 23 octobre 1983 à Beyrouth), tout comme les 13 morts et les 250 blessés des 10 attentats de Paris (1985-86), ainsi que le général Rémy Audran, «Monsieur Irak» de la Direction Générale de l’Armement (DGA) et l’universitaire Michel Seurat, en 1988, paieront de leur vie au titre des «dommages collatéraux» le prix de cette politique dont le bilan au terme de la décennie 1980 se révèlera calamiteux tant pour l’Irak, que pour la France, par ricochet pour le Liban et pour l’Arabie Saoudite: L’Irak se perdra, la France perdra l’Irak et son aura, le Royaume wahhabite tombera sous la coupe américaine entraînant dans sa chute le golfe pétro monarchique. Les deux anciens «co-belligérants» seront rétrogradés au Liban au bénéfice des Etats-Unis et de la Syrie, la coexistence libanaise sera sauvegardée, mais dans un contexte nouveau, sous une nouvelle formule et sous un nouveau parrainage. Le Royaume saoudien devra, lui, pour desserrer l’étau américain, normaliser ses relations avec son éternel rival, l’Iran.

La course éperdue vers la conquête des «marchés du siècle» par la «bande des quatre» de l’armement (Dassault, Thomson, Aérospatiale, Matra Lagardère), aiguillonnée par la Compagnie Française des Pétroles (CFP Total), la griserie procurée par les juteux contrats civils et militaires (1), de l’ordre de sept cents milliards de FF pour l’Irak en quinze ans, brouillaient quelque peu la visibilité à l’époque: la coopération franco-haririenne prend donc de l’ ampleur, en 1982, dans la foulée de l’effondrement militaire irakien face à l’Iran lors de la bataille de Khorramchahr (Mai 1982) et de la débâcle occidentale suivant l’invasion israélienne du Liban (Juin 1982). Poisson pilote du Royaume Wahhabite, Rafic Hariri prend la relève de la diplomatie occidentale défaillante après la chute de Beyrouth Ouest aux mains des milices musulmanes, en février 1984, et se livre à une sorte de diplomatie volante pour mettre sur pied une conférence interlibanaise de réconciliation à Genève, puis à Lausanne en Mars 1984.

Paris lui apporte un appui résolu, envisageant un moment -l’idée avait été émise par François de Grossouvre, ancien conseiller du président François Mitterrand- de parrainer la réconciliation libanaise à bord d’ un porte-avions de la marine française. Par ricochet, la France décroche deux importants contrats militaires en Arabie saoudite d’une valeur globale de 49 milliards de FF, dont le fameux contrat de défense antiaérienne Shahine, d’un montant de 35 milliards de FF. Ce marché, conclu en 1984, l’année de la conférence de Lausanne, apparaîtra comme une rétribution déguisée saoudienne à l’implication de la France dans les conflits du Moyen-Orient, la préfiguration des contrats de compensation conclus par les pétromonarchies en 1991-1992 après la seconde guerre du Golfe contre l’Irak. Au delà de sa dimension diplomatique et militaire, ce contrat, hors de proportion des besoins du Royaume, aura eu le mérite de générer une commission de 3,5 milliards de FF équitablement répartie entre partenaires Français et Saoudiens (2).

Celui qui n’était alors qu’un homme d’affaires prospère prend alors une stature régionale et tandis que le Golfe est déstabilisé par la guerre irako iranienne, procède à son redéploiement international. Paris devient sa terre d’élection. Le lien s’affirme véritablement deux ans plus tard sous le gouvernement de Jacques Chirac (1986-1988) à l’époque de la première cohabitation socialo gaulliste, une période trouble, ponctuée par la vague d’attentats de Paris et la prise d’otages français à Beyrouth. Artisan de la coopération stratégique avec l’Irak, en 1974, le premier ministre français bénéficiait de surcroît auprès des pétromonarchies du golfe d’un capital de sympathie, survivance de l’héritage gaulliste.

La relation d’affaires interétatique prend alors une touche plus personnelle entre deux hommes animés d’une même ambition, la conquête du pouvoir suprême. La contribution de Rafic.Hariri à la libération d’otages français du Liban sera mentionnée aux côtés d’autres membres de la filière franco-libanaise, gravitant autour de Charles Pasqua, ministre de l’intérieur de l’époque et de son assistant Jean-Louis Marchiani.

Représentant la quintessence du clientélisme libano africain du réseau chiraquien, cette filière, d’une combinaison étonnante, groupait des notables chiites d’Afrique, Najib Zaher (Côte d’Ivoire), le Cheikh Zein et Ibrahim Baroud (Sénégal), faisant office en la circonstance d’intermédiaires auprès de leurs coreligionnaires libanais et iraniens, l’homme d’affaires cosmopolite Alexandre Safa, le médecin franco-libanais néo-gaulliste Razah Raad et le sempiternel M.Bons Offices des liaisons franco-libanaises, l’évêque grec orthodoxe Ghofril Salibi et son coréligionnaire, le millionnaire Issam Pharès, ainsi que Anthony Tannoury. Le concours de Rafic Hariri au dénouement de l’affaire n’a pu être établie de manière formelle. Mais -pur hasard?- la remise en liberté d’otages français a souvent coïncidé avec des opérations humanitaires du milliardaire libanais, sous forme de distribution de vivres et de biens dans les régions nécessiteuses de Beyrouth Ouest contrôlée alors par les milices musulmanes.

L’homme d’affaires accompagne ses premiers pas en politique internationale par une restructuration de ses entreprises et leur recentrage sur l’Europe. Il fonde en France son «Holding de participations et d’investissements (HPI)» au capital de 200 millions de FF et regroupe à Paris la totalité des activités de ses sociétés en Europe: Saudi-Oger, Fradim et la Fondation Hariri. Elargissant le cercle de ses relations, il noue des relations avec la classe politique française toutes tendances confondues au point d’obtenir son inscription à l’annuaire diplomatique français, sur le quota de l’Arabie saoudite au titre de 3me conseiller, se conférant ainsi une immunité diplomatique, avec en prime la régularisation de la situation de Radio Orient, qui émettait depuis sa fondation en 1980 dans des conditions d’illégalité.

A l’intention des socialistes, de retour au pouvoir en 1988, il soulagera la trésorerie défaillante de l’Institut du Monde arabe (IMA) en injectant dans ses caisses 15 millions de dollars. Il lui fera également don d’une banque de données sur le Monde arabe. Par un juste retour des choses, le président de cet établissement, M.Edgar Pisani, ancien ministre gaulliste, sera un très actif conseiller socialiste du président François Mitterrand au moment de l’attribution de Radio Orient à Hariri par le CSA (Conseil supérieur de l’audiovisuel) en 1991. Le milliardaire libano saoudien prêtera aussi main forte aux financiers français pour sauver de la déconfiture la Saudi Bank à Paris vidée de sa trésorerie par des sorties inconsidérées d’argent de la coterie royale. L’ardoise, imputable selon la terminologie officielle, à des créances dépréciées sur des pays lourdement engagés du tiers monde, s’est élevée à 2,1 milliards de FF.

Intervenant dans la foulée de la défaillance de deux autres banques arabes de Paris, -la Banque de Participation et de placement et l’United Banking Corporation- la déconfiture de la banque saoudienne risquait de mettre en question la fiabilité de Paris en tant que place financière et plate-forme politique de M.Hariri, à l’effet de contrarier les projets du futur premier ministre libanais.

Le milliardaire d’origine libanaise paiera rubis sur ongle. Il sera couvert de louanges pour une opération de fausse philanthropie qui répondait avant tout à des considérations de haute stratégie personnelle, puisqu’elle lui donnait l’occasion de voler au secours du pavillon saoudien malmené, d’éponger les dettes de ses bienfaiteurs et de s’acquitter en même temps d’une dette de gratitude à leur égard, de sauvegarder enfin la réputation de la place financière de Paris et de consolider ainsi ses assises politiques parisiennes. Le retour sur investissement sera immédiat.

En 1990, c’est le début de la mise sur orbite politique de Rafic Hariri, un impératif pour les Saoudiens soucieux d’assurer la relève de l’Islam sunnite libanais déclinant avec la guerre du Liban. Un impératif aussi pour la France qui se prête de bonne grâce à l’opération, avec d’autant plus d’empressement qu’ elle est à la recherche d’un nouveau partenaire arabe à substituer à l’Irak qu’ elle venait de perdre sans compensation avec la 2me guerre du Golfe. Un impératif également pour Jacques Chirac, profondément déstabilisé par sa 2me défaite électorale face à François Mitterrand dans la compétition présidentielle. Avec le même empressement, le Maire de Paris ouvre les portes de sa ville à Rafic Hariri pour faire de la capitale française le tremplin politique du futur premier ministre libanais.

Fradim et les enfants chéris du chiraquisme, Cogedim et Dumez, opèrent côte à côte dans de grands projets de rénovation urbanistique dans les quartiers huppés de Paris et sur la Côte d’Azur. Immobiliers d’entreprise, hôtellerie, habitation de luxe, innovation immobilière, notamment pour le groupe Hariri la construction de l’hôtel Sheraton de l’aéroport de Bruxelles, la réhabilitation de l’hôtel particulier Van Dyck, celle de l’ancien siège de Vallourec, rue Spontini, dont il fera le nouveau siège parisien de son holding, l’acquisition du Monte-Carlo Palace (principauté de Monaco) pour 400 Millions de FF en 1989, et de la résidence de Gustave Eiffel, place du Trocadéro, dont il fera son pied à terre parisien: Rien ne résiste à ce trio d’enfer. Cogedim et Dumez s’ associent dans la première Z.A.C privée de Paris -ZAC Paris Porte Maillot- (3) et le président de COGEDIM, Michel Mauer, précédera de trois ans André Kamel, directeur international de Dumez, en prison pour fausses factures.

Le total des investissements immobiliers du groupe Hariri en France en une décennie (1980-90) est estimé alors à près de 70 milliards de FF, soit le quart des exportations civiles françaises annuelles vers le royaume saoudien, hors contrats militaires. Tandis que leurs anciens alliés communs irakiens pliaient bagages, M. Hariri y installait son PC de campagne en prévision de sa conquête du pouvoir deux ans plus tard en 1992. Un centre de documentation est aménagé à proximité des Champs Elysées pour son équipe de conseillers, à quelques pas d’une ambassade du Liban restaurée à grand frais sur ses deniers personnels pour son nouvel occupant, Johnny Abdo, ancien chef du 2ème bureau de l’armée libanaise, ambassadeur en titre mais officieux chargé de mission de Rafic Hariri auprès des milices chrétiennes libanaises.

Pour cet ancien comptable de Saida, qui dû payer son tribut à la famille royale saoudienne, cette consécration est la justification de tous ses sacrifices. Elle sera vécue comme un sacre et marquera le début d’une lévitation politique qui se prolongera pendant près d’une décennie.

Planche de salut pour la politique arabe de la France, ballon d’oxygène pour les néo-gaullistes et les entreprises françaises dans le Golfe, Rafic Hariri sera l’objet d’égards particuliers. Comme par anticipation d’un désir, il se verra gratifier d’un cadeau royal: Radio Orient, la plus ancienne et la plus importante radio arabophone d’Europe continentale, installée à la fréquence de son choix, avec un émetteur au sommet de la Tour Eiffel à la puissance de son choix (1.000W), avec des relais (500W) dans des villes-charnières, Annemasse pour la Suisse, Lyon pour la jonction méditerranéenne et Bordeaux pour la façade atlantique, pour des émissions en continu (24H/24) sur un rayon d’action couvrant l’espace français jusqu’aux parages de la ville hautement symbolique de Poitiers.

Cas unique dans les annales des grandes démocraties, Rafic Hariri sera d’ailleurs le seul chef du gouvernement étranger à disposer d’une radio privée dans une métropole occidentale. Ce privilège qui traduit l’importance primordiale que revêt désormais le milliardaire libano saoudien aux yeux de la France, est apparu d’autant plus exorbitant qu’il ne s’est accompagné d’aucune mesure de réciprocité pour une radio française à Beyrouth. Il sera néanmoins maintenu en dépit des protestations répétées des auditeurs déplorant le rôle de relais de cette radio de sensibilité saoudienne dans la retransmission des sermons rigoristes du conservatisme wahhabite vers une population en butte à l’intégrisme islamique.

Comme emportée par un tourbillon, la classe politique française sera atteinte, à son tour, de «Hariromania» au point que les pouvoirs publics caresseront même l’idée de lui céder partiellement ou totalement RMC Moyen-orient, principal vecteur français vers le monde arabo-musulman, sans se préoccuper de priver la France d’un instrument d’accompagnement diplomatique dans la sphère méditerranéenne, sans songer à se remémorer par complaisance ou par ignorance le rôle restrictif de M. Hariri dans le domaine de la liberté de la presse au Liban.

Au diapason de la classe politique, des grands commis de l’Etat participeront de cet engouement généralisé. Il était alors de bon chic de graviter dans les parages de Rafic Hariri au point que tel responsable du pôle radiophonique n’hésitera pas à se livrer à une laborieuse acrobatie juridico-financière pour faire acte de présence à Beyrouth, allant même jusqu’à solliciter le concours du groupe Hariri, l’adversaire le plus direct des ondes françaises au Moyen-Orient, pour la réalisation de son objectif. L’autorité de tutelle aura toutes les peines du monde à le faire renoncer son projet, jugeant «embarrassant» ce «curieux montage» et «strictement dangereux» ce «micmac libanais» (4).

Qu’un rappel à l’ordre se soit imposé pour inviter à la retenue un fonctionnaire d’autorité donne la mesure de la déperdition de la traditionnelle rigueur au sein du corps des grands serviteurs de l’état.

Sauf à y voir la marque d’une ductilité, tant de prosternation devant le nouveau «Mamamouchi libanais», au delà d’ailleurs de l’attente de l’intéressé lui-même, donne la mesure de l’érosion du sens de l’état au sein de la haute administration française. Sauf à y voir la marque d’une serviabilité extrême, tant de révérence au mépris des intérêts primordiaux du pavillon français débouchera immanquablement sur un naufrage. Le fleuron de la présence française dans le monde arabe, le module RMC-MO-RFI, sera supplanté par Radio Hariri et la concurrence anglo-saxonne dans les principaux points d’articulation de la politique française au Moyen-Orient: Le Caire, Beyrouth et Damas où Radio Orient compte sept fois plus d’auditeurs que sa rivale française (21% pour Radio Orient, contre 3% pour RMC MO) (5). Le verdict est sans appel, le camouflet absolu.

Exaltante, la perspective d’appartenir au cercle ultra restreint des «heureux élus» primait alors toute autre considération quand bien même ce sentiment illusoire est par essence éphémère. Rafic Hariri succombera à son tour à cette griserie, songeant, semble-t-il, à un destin de médiateur régional, entre l’Iran et l’Arabie Saoudite, la Syrie et la France, l’Egypte et les financiers internationaux. Négligeant les effets corrosifs de la déconfiture électorale de son partenaire français et le règne crépusculaire de son parrain saoudien, faisant fi du ressentiment de la population libanaise, Rafic Hariri mû par un sentiment de prépotence défiera sur leur chasse gardée les vieux caciques de la politique régionale qui observaient avec une pointe d’amusement ce vizir libanais se cherchant un rôle de grand vizir. Tant d’insolence finira par agacer. Un couperet finira par sanctionner ce péché d’orgueil, mettant brutalement un terme à la période de lévitation politique de M.Hariri, provoquant par voie de conséquence un collapsus de la politique française au Levant. L’erreur de casting était manifeste.

--> Lire la suite de l'article sur Tlaxcala ou sur Quibla
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(*) René Naba, journaliste-écrivain, auteur de «Aux origines de la tragédie arabe», Editions Bachari, Juin 2006.

Ancien responsable du monde arabo-musulman au service diplomatique de l’AFP (1980-1990), ancien conseiller du Directeur général de l’Information de RMC-Moyen Orient (1989-1994), René Naba est, en outre, l’auteur des ouvrages suivants :

- «Guerre des ondes, Guerre des religions, la bataille hertzienne dans le ciel méditerranéen», L’Harmattan 1998

- «Rafic Hariri, un homme d’affaires premier ministre», L’ Harmattan 2000

- «Du Bougnoule au sauvageon, voyage dans l’imaginaire français», L’Harmattan 2002

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17 février 2007

Charlie Sarkozy et Nico Hebdo

(Ben Heine © Cartoons)

« Je préfère un excès de caricature à un excès de censure ». « Je tiens à apporter mon soutien à votre journal qui s’inscrit dans une vieille tradition française, celle de la satire ». « Il faut défendre le droit de sourire de tout».

À propos du Docteur Sarko, de Mister Val
et de la liberté d’expression
Par le Collectif Les mots sont importants
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C’est par ces mots que le ministre de l’intérieur Nicolas Sarkozy, dans une lettre lue lors de l’audience par l’avocat Georges Kiejman, a publiquement apporté son soutien à Charlie Hebdo dans le procès que lui intentent la Mosquée de Paris et l’Uoif pour avoir publié des dessins racistes (comment, répétons-le, peut-on appeler autrement un dessin qui, représentant le prophète Mahomet lui même coiffé d’une bombe, véhicule l’équation Islam = terrorisme et donc musulman = terroriste potentiel ?). Nous voici donc à nouveau en pleine farce...
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Une gigantesque farce macabre, sordide, qui provoque autant l’envie de rire que celle de pleurer ou de vomir, tant elle charrie de violence à l’égard des mêmes, toujours les mêmes : ceux qu’il est devenu non seulement légitime, mais spirituel et distingué, de vilipender, injurier et diffamer quasi-quotidiennement depuis quelques années ; ceux qu’il n’est même plus nécessaire de nommer tant leur nom est devenu familier, tant « nous » nous sommes habitués à « eux » dans le rôle du méchant que nos journaux accusent de mettre en péril la sécurité des biens et des personnes, les acquis du féminisme et ceux de la laïcité, sans oublier bien sûr la liberté d’expression ; ceux qui n’ont accès à aucun grand média pour dire leur désaccord, leur tristesse ou leur colère ; ceux qu’on peut courageusement frapper puisqu’ils sont à terre et désarmés : les musulmans.
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Pourquoi une farce ? Les raisons sont multiples, en voici simplement une : le ministre qui défend avec autant de lyrisme le droit de « sourire de tout » - et qui, même sur ce sujet, parvient à ethniciser la problématique en faisant du registre satirique « une vieille tradition française » [1] - est l’un des hommes politiques qui a poussé le plus loin la connivence entre la presse, la télévision, l’appareil d’État et les puissances d’argent (cf. Marie Bénilde, « M. Sarkozy déjà couronné par les oligarques des médias ? »), celui qui s’autorise à choisir quel journaliste doit « couvrir » l’UMP sur Europe 1, celui qui a fait limoger le directeur d’un hebdomadaire [2] parce qu’il avait eu le malheur de « sourire » de ses démélés conjugaux [3]. C’est le ministre qui a fait voter une loi punissant de milliers d’euros d’amende et de prison « l’outrage à l’hymne national et au drapeau ». Le droit de sourire de tout connaît manifestement des limites...
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L’homme qui clame qu’un « excès de caricature » vaut toujours mieux qu’un « excès de censure » est aussi le ministre qui a harcelé judiciairement [4] Hamé, du groupe de rap La Rumeur, coupable à ses yeux d’avoir simplement énoncé un fait : ces dernières décennies, « des centaines de nos frères sont tombés sous les balles de la police sans que leurs assassins ne soient inquiétés».
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Arrêtons nous un instant sur cette dernière affaire. Charlie Hebdo n’a pas publié l’article de Hamé poursuivi par le ministre de l’Intérieur, pourtant d’une toute autre tenue que les « caricatures » islamophobes que Philippe Val s’est empressé de republier en janvier 2006. Étonnant, non, cet attachement gyrovague à la liberté d’expression ?
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Il est vrai que des caricatures islamophobes s’insèrent plus harmonieusement dans la ligne politique du Charlie Hebdo New Look de Philippe Val qu’une dénonciation des violences et de l’impunité policières. La tendance Valienne est même plutôt à hurler avec les loups contre les « jeunes de banlieue », et même à lancer des « bien fait ! » haineux sur le cadavre d’un gamin de 17 ans abattu d’une balle policière dans la nuque, comme le fit Cavanna dans un Charlie hebdo de janvier 2002 (cf. Olivier Cyran, « Lettre ouverte à Cavanna, fabricant de haine »).
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Philippe Val est d’ailleurs réputé lui-même pour être un petit Sarkozy médiatique, tant par ses options de plus en plus droitières, néo-libérales, pro-américaines et pro-israéliennes, islamophobes et anti-arabes [5] que par sa légendaire autocratie et sa non moins légendaire volonté de verrouillage idéologique au sein de son journal. Comme l’ont déjà rappelé, entre autres, PLPL, Olivier Cyran, Mona Chollet, CQFD et Le Plan B...
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Notes :
[1] C’est bien connu : on ne sait pas rire des puissants en-dessous de la Méditerrannée !
[2] Paris Match
[3] Une vie conjugale pourtant exhibée sans aucune retenue par le ministre tant qu’elle correspondait au cliché de la force tranquille du Pater familias
[4] Plainte en 2002, procès en 2004, procès en Appel en 2006, et désormais pourvoi en Cassation. Cf. Hamé, « Insécurité sous la plume d’un barbare »
[5] Par exemple : le 5 janvier 2005 dans Charlie Hebdo, évoquant les « terroristes islamiques », Philippe Val explique que ces derniers « adorent égorger les Occidentaux, sauf les Français, parce que la politique arabe de la France a des racines profondes qui s’enfoncent jusqu’au régime de Vichy, dont la politique antijuive était déjà, par défaut, une politique arabe. » Qualifier de la sorte la politique antijuive de Vichy n’a aucun sens puisqu’aucune influence arabe n’a évidemment joué un quelconque rôle dans cette entreprise criminelle. Pour que cette phrase insensée signifie quelque chose, il faut admettre le postulat selon lequel les Arabes, en bloc, sont antisémites par nature, au point de se reconnaître unanimement dans la politique vichyste.
En d’autres termes : Philippe Val essentialise « les arabes », en fait une entité homogène, pour ensuite attribuer à cette essence (« les arabes ») un caractère infâmant (« antisémite »). Cette manière de penser porte un nom : le racisme. Et c’est aussi le racisme qui conduit à assigner en bloc « les émeutiers » de novembre 2005 à une identité musulmane-donc-rétrograde et violemment sexiste, alors que rien, dans le déroulement desdites émeutes, ne se pose en ces termes : « Ceux qui croient voir des convergences entre Mai 68 et novembre 2005 se trompent lourdement. On ne peut pas imaginer une seconde qu’un Cohn-Bendit puisse jouer un rôle quelconque dans ces événements, ne serait-ce que parce qu’il est juif. C’est à cela que l’on peut mesurer l’étendue du désastre culturel. Par ailleurs, Mai 68 a commencé parce que les garçons voulaient aller dans le dortoir des filles et vice-versa. Chez les émeutiers de nos banlieues, c’est exactement le contraire. La mixité est leur ennemi! e, ils veulent les filles voilées et inaccessibles à qui n’est pas coreligionnaire. »
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--> Cet article est d'abord apparu sur oumma.com le 13 février 2007
--> Retrouvez bien plus sur
www.michelcollon.info
--> Remerciements à M. Paul Delmotte pour avoir envoyer l'article ci-dessus.

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14 février 2007

Choc des civilisations,
choc des ignorances ?
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12 février 2007

Entretien avec Paul Delmotte

"L’idéal serait de retrouver des solidarités au-delà des ethnies, au-delà des religions, au-delà des frontières. C’est un vaste programme!"
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(Ben Heine © Cartoons)

Paul Delmotte est politologue, spécialisé sur les problèmes du monde arabe, Professeur de politique internationale à l’Institut des Hautes Études des Communications Sociales (IHECS) et membre de l’Association Belgo-Palestinienne (ABP).

Selon vous, le journal Charlie Hebdo a –t’il bien fait d’exploiter les 12 caricatures de Mahomet publiées quelques semaines plus tôt dans le Jyllands Posten?

Personnellement, je suis très critique vis à vis de l’attitude de Charlie hebdo, qui a manifestement réalisé là une opération commerciale. Une opération commerciale qu’il a justifiée au nom de la liberté d’expression. Mais on sait que le problème des caricatures ne se limite pas à la question de la liberté d’expression.

J’ai déjà eu l’occasion de rencontrer Philippe Val, le rédacteur en chef de Charlie Hebdo. J’ai pu remarquer chez lui une attitude extrêmement méprisante vis-à-vis de l’islamisme et de l’islam. Par rapport à la guerre civile en Algérie dans les années ‘90, j’ai aussi constaté que M. Val se rangeait complètement du côté de la junte militaire.

Il y a un anti-islamisme primaire chez M. Val qui, a mon avis, a joué dans la publication de ces caricatures, mais je pense que l’aspect commercial a également joué. C’est du moins mon opinion.

Pensez-vous qu’il existe des limites à la liberté d’expression ? Si oui, quelles sont les frontières à ne pas dépasser ?

Quand on analyse le problème des caricatures, il ne faut pas se braquer sur la liberté d’expression, parce que si l’on voit tout en terme de liberté d’expression, on ne se permet que d’écouter un seul camp, c'est-à-dire le camp occidental, qui a perçu toute cette crise à travers le prisme de la liberté d’expression.

Pour les musulmans (je vais généraliser, mais précisons bien que tous les musulmans n’ont pas réagi de la même façon, d’ailleurs seulement une minorité d’entre eux a manifesté, contrairement à ce qu’ont voulu nous faire croire les médias occidentaux), il y avait surtout le reproche de voir leur religion assimilée au terrorisme, à travers la personne du prophète Mahomet. Il s’agissait donc pour eux de protester contre cet amalgame, ce qui a été interprété, de l’autre côté, comme une atteinte à la liberté d’expression.

Je crois donc qu’il y a surtout eu un énorme malentendu, un malentendu qui ne fait que se poursuivre et empirer. On l’a vu avec l’épisode de Benoît XVI. On le voit aussi, en partie, dans ce qui se passe maintenant avec l’Iran. Par rapport aux déclarations du président iranien sur le génocide juif, je crois qu’il y a un malentendu et une surdité réciproque qui s’aggravent.

Selon vous, y-a-t’il une seule liberté d'expression, ou en existe-t’il plusieurs ? (En fonction des différentes cultures d’un pays à l’autre)

Je crois que la plupart des personnes qui ont protesté contre les caricatures n’en étaient pas moins partisanes de la liberté d’expression. Elles étaient contre le droit à l’injure, car cette publication a été perçue comme une insulte. C’est une première chose.

D’un autre côté, il est assez amusant de voir où les manifestations ont eu lieu et qui les a soit organisées, soit menées. Je prends pour exemple la Syrie qui est un pays réputé pour sa chasse aux islamistes. On se rappelle la manière dont le régime Assad a massacré, en 1982, plus de 20.000 Frères musulmans dans la ville de Hama[1]. Ce sont donc des régimes considérés comme laïcs qui ont voulu se refaire une virginité en matière de fidélité à l’Islam.

Un autre élément important : Dans les territoires palestiniens, on a aussi vu de nombreuses manifestations contre les caricatures, ce n’était pas les gens du Hamas qui manifestaient, mais les gens du Fatah. Donc, vous voyez, tout cela a été largement manipulé aussi.

Que pensez-vous du concours de dessin sur l’Holocauste organisé par le quotidien iranien Hamshari en réponse aux caricatures du prophète Mahomet publiées dans divers quotidiens européens ?

Je comprends fort bien que pour tout occidental, c’est inacceptable, c’est un scandale, c’est une provocation. C’est une provocation qui dans l’esprit de M. Ahmadinejad visait à riposter à l’affaire des caricatures de Mahomet.

Ce faisant, comme il avait sûrement perçu, comme de nombreux autres musulmans, qu’il y avait raillerie dans les caricatures danoises, je suppose que M. Ahmadinejad a voulu organiser une grande moquerie par rapport à ce qu’il appelle un « mythe occidental » qui est la mémoire de l’Holocauste, la mémoire de la Shoah.

Je le déplore évidemment, ce que je veux dire, c’est que ça ne suffit pas de le déplorer. Peu importe la personnalité d’Ahmadinejad. Ce qui importe de savoir, c’est pourquoi de telles petites phrases lancées par le président iranien sur le génocide et sur Israël, pourquoi la conférence négationniste de Téhéran et les autres initiatives d’Ahmadinejad ont-elles un tel écho et lui fournissent une popularité relative dans la région ? Même si, il faut insister là dessus, vous avez aussi eu des manifestations étudiantes en Iran pour dénoncer les initiatives d’Ahmadinejad.

Ce qui prouve que l’on peut retourner le portrait d’Ahmadinejad publiquement en Iran, sans se faire arrêter pour autant, puisqu’il n’y a eu aucune arrestation.

Pensez-vous que le dessin est une force politique qui peut faire changer le comportement des gens ?

Oui, je pense que le dessin est-il une force politique qui peut changer le comportement des gens. J’apprécie beaucoup les dessins politiques. Il y en a qui sont vraiment remarquables.

D’un autre côté, tout dépend de qui les dessine. Il est évident que tout le monde peut faire un dessin politique. Quand une caricature a du succès, on devrait chaque fois se demander pourquoi elle a du succès.

Qu’est-ce qui déclenche l’amusement, qu’est-ce qui déclenche le rire chez ceux qui les voient en Occident ? Sur quelles fibres jouent ces dessins ? Il y a évidemment une variété de réponses.

Comme vous avez consacré une grande partie de votre vie à l’étude des questions proche et moyen orientales, et en tant que membre de l’association belgo-palestinienne, que proposeriez-vous pour rapprocher les cultures ?

Il y a plusieurs niveaux d’action. Je vais les énumérer sans ordre de priorité :

- Un premier niveau d’action qui me semble très important est de faire comprendre aux Occidentaux en quoi leur vision du monde arabo-musulman est souvent déformée et en quoi elle est en train de se déformer encore plus.

- Un autre niveau d’action, plus directement politique celui là, serait que la « communauté internationale » (j’utilise ce terme toujours avec des pincettes), disons l’Occident, prenne enfin des mesures et tienne un discours qui ferait en sorte qu’il ne soit plus considéré au Proche Orient comme pratiquant la politique des deux poids deux mesures.

- Un troisième niveau d’action serait de cesser d’ethniciser le conflit, d’en faire un conflit entre ethnies ou entre religions, et de montrer qu’il s’agit en fait d’un conflit d’intérêts et d’un conflit Nord-Sud.

L’idéal serait de retrouver des solidarités au-delà des ethnies, au-delà des religions, au-delà des frontières. C’est un vaste programme! Je ne préjuge pas de son succès. Il est plus que temps de s’y mettre.
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--> Propos recueillis par Benjamin Heine, Etudiant en Presse-Info à l’IHECS
[1] Hama est une ville se trouvant en Syrie, théâtre de violents affrontements entre les Frères musulmans, les nationalistes arabes du Baath irakien, la gauche syrienne et l'armée Syrienne de Hafez el-Assad en février 1982. En 1980, un Frère musulman tente d’assassiner le président syrien Hafez el-Assad. Plusieurs imams sont alors arrêtés par le clan alaouite. Le 2 février 1982, sous la conduite de 150 officiers sunnites, la ville de Hama se révolte. Assad réagit violemment en donnant l’ordre d’assiéger la ville et de la bombarder à l’artillerie lourde. Un tiers de la ville - comptant de nombreux joyaux architecturaux – sera détruit et entre 10 et 25 000 civils seront tués pendant les 27 jours de siège sans que la communauté internationale ou l'opinion publique mondiale ne réagissent. (Source : Wikipédia)

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08 février 2007

Partenariat "sportif" entre l'IHECS et l'UCL

IHECS Sport !
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Les étudiant de l'Ihecs pourront dorénavant profiter de l'infrastucture sportive de l'UCL ainsi que d'abonnements à des tarifs préférentiels!

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04 février 2007

Posez vos questions à Didier Reynders

Ce mardi 6 février, je vais faire une interview de Didier Reynders, président du parti réformateur. Si vous désirez lui poser une question, envoyez un mail à messagesblog@gmail.com et indiquez dans l'objet du message: Question au MR.

Thomas

Blog: http://lesjourspassentmaisneseressemblentpas.blogspot.com/

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